Lorenzaccio @ Martyrs
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Écrit par BrusselsLife Team -
24 août 2008, 00:00
(Mis à jour: 13 déc. 2012, 07:59)

Après les grands succès de On ne badine pas... et Les Caprices de Marianne et une dizaine de Shakespeares, il était presque inévitable que la troupe de Théâtre en Liberté se frotte enfin à Lorenzaccio. Pièce fleuve et ambiguë, monstre incohérent pour les uns, chef d'oeuvre pour les autres, Lorenzaccio est la pièce point de rencontre du théâtre classique et des préoccupations contemporaines.
Le défi de la pièce n'est pas dans le nombre des personnages, la succession des lieux, la richesse des costumes, mais dans la recherche de l'équilibre des trois dimensions, qui range Lorenzaccio parmi les dix chefs-d'oeuvre du théâtre français : le drame romantique du moi affronté à son propre reflet, la tragédie historique de la révolution avortée, le drame existentialiste de l'individu en situation limite.
Personnalité déchirée, contradictoire, comme la plupart des héros romantiques, Lorenzo ne peut être assimilé à ces héros masqués qui feignent l'indolence le jour mais deviennent d'énergiques redresseurs de torts la nuit. Son action marque sa conscience. Le paraître et l'être se rejoignent. La personnalité de Lorenzo, la perception qu'il a de lui-même, de son existence et de ses valeurs se diluent à la mesure de la dissimulation dont il doit faire preuve pour intégrer le cercle des proches d'Alexandre.
Face à une société qui l'amène à commettre des actes qu'il réprouve intérieurement, l'homme peut-il s'accomplir ? La réponse de Musset est négative. L'action (réelle ou théâtrale) est dénoncée, elle n'est ni révélatrice ni porteuse de sens. Le thème récurrent du déguisement et du masque renvoie à l'aspect théâtral de la réalité même. La parole (et en particulier la parole théâtrale) devient l'élément réellement signifiant. C'est par elle que les tourments du personnage se traduisent. C'est elle qui porte le sens de la pièce.